Deux communiqués, en provenance d'Italie, se croisent dans la journée du vendredi 16 mars. Le premier, en provenance de Rome, annonce la nomination de Marco Müller, ex-directeur de la Mostra de Venise, à la tête du Festival du film de Rome. Le second, en provenance de Venise, annonce la mise en place d'un véritable marché du film dans le cadre de la Mostra.

La simultanéité des deux annonces, dont il est peu probable qu'elle soit hasardeuse, rallume le spectre de la guerre intestine que se livrent depuis 2006 Rome et Venise. Jusqu'à aujourd'hui, la situation était pourtant claire. A votre droite, Venise, le plus ancien festival de cinéma du monde, et l'un des plus prestigieux en termes d'accomplissement artistique et de séduction touristique. Points faibles : la cherté de ses infrastructures, la vétusté de sa logistique, l'absence d'un marché du film digne de ce nom. Une plaie qui condamne depuis de longues années Venise à subir la préséance du Festival de Cannes.

A votre gauche, Rome, qui rêve depuis longtemps d'une manifestation cinématographique digne de sa grandeur. C'est chose faite en 2006, sous le mandat du maire Walter Veltroni, avec un festival qui entreprend de tailler des croupières à Venise. Puisant dans un budget qui dépasse celui de son auguste concurrent (10 millions d'euros contre 8 pour Venise), Rome joue l'exubérance et le glamour, invite des stars américaines, héberge royalement les professionnels dans ses palaces. Le résultat est mitigé : en dépit de sa popularité, sa programmation ne parvient pas à soutenir le niveau de celle de Venise.

Plus-value artistique
L'ironie du jour est que Marco Müller, excellent directeur artistique de la Mostra depuis 2004, vient de quitter sa fonction faute d'avoir obtenu des assurances sur la modernisation de la manifestation. Le conseil d'administration lui a choisi comme successeur Alberto Barbera, un professionnel estimé qui a déjà occupé ce poste de 1999 à 2001, tout en confiant au Français Pascal Diot la tâche de mettre sur pied un véritable marché du film. Quant à Müller, il succède à Piera Detassis à Rome, où sa nomination fait d'ores et déjà office de plus-value artistique. Cette hypothèse d'un Rome plus "artistique" et d'un Venise plus "professionnel", si elle se confirmait, aurait toute chance de faire parler la poudre.

Réf : lemonde