"Titanic" en 3D : ma déclaration d'amour à un chef-d'œuvre intemporel

LE PLUS. "I am the king of the world" : il y a 14 ans, cette phrase circulait beaucoup dans les cours d'école et dans les discussions entre amis. Alors que "Titanic" sort une nouvelle fois en salles, il est temps de savoir si nos cœurs de midinette sont marqués par la nostalgie ou si le film est réellement un bijou cinématographique. L'avis de Christopher Ramoné, cinéphile.

Près de 15 ans après la découverte de ce chef d’œuvre signé James Cameron, "Titanic" ressort dans une version 3D, restauré et converti. En 1998, j’avais 9 ans. Aujourd’hui, 23. On se dit qu’avec plus de maturité, on trouvera "Titanic" moins léché ou impressionnant, plus niais et téléphoné. Que nenni !


Southampton, 10 avril 1912. Le paquebot le plus grand et le plus moderne du monde, réputé pour son insubmersibilité, le "Titanic", appareille pour son premier voyage. Quatre jours plus tard, il heurte un iceberg. A son bord, un artiste pauvre et une grande bourgeoise tombent amoureux.

Je me souviens encore, non pas de la peinture fraîche et de la porcelaine étincelante qui n’avait encore jamais servie, mais plutôt de ce moment de cinéma vécu pendant les vacances de février 1998, dans un cinéma des Côtes-d’Armor.

Une passion pour l'histoire du Titanic 
A l’époque, le cinéma était pour moi un divertissement. A priori, aucune vocation à l’horizon. Mais depuis quelques mois déjà, je m’étais passionné pour l’histoire du Titanic. Je me vois encore lire et relire les pages du "Sciences & vie" de mon père où James Cameron et son équipe racontaient leurs voyages à bord du Titanic, qui gît par 3800 mètres de fond.

Épris de l’histoire du Titanic, James Cameron décidait d’en faire une fiction, avec romance et réalisme. Deux "R" magiques qui allaient, une nouvelle fois, faire basculer le Titanic dans la légende. Je découvrais alors avec un sentiment mêlé de joie et d’horreur ce qui allait être un futur film culte. Les larmes contenues, mon esprit percutait celui du film, et les images des passagers tentant de survivre à l’eau glacée ont hanté les nuits suivantes.

"Titanic" (20th Century Fox)

James Cameron avait réussi à faire un film réaliste d’une efficacité redoutable, ce qui était chose rare. Son scénario se doublait d’une relation amoureuse épique et éphémère entre un pauvre artiste au charme certain (Leonardo DiCaprio) et une illustre bourgeoise, dont la famille l’avait contrainte à se marier pour sauver le nom qu’elle portait (Kate Winslet). Dans les clivages sociaux, alors que la catastrophe se fait plus présente que jamais, James Cameron filmait la beauté d’une romance unique, avec force, émotion et puissance. Jamais un couple à l’écran n’avait été aussi beau, parce qu’enveloppé dans un sens de la mise en scène aiguisé.

Un succès sans égal 
Le résultat était incroyable. Le succès qui a suivi aussi. "Titanic" marquait l’Histoire du cinéma (n’ayons pas peur des majuscules) à jamais, égalant même "Ben Hur" en briguant 11 statuettes aux Oscars. Le film dépasse allégrement le milliard de recettes à travers le monde et rassemble plus de 20 millions de spectateurs français dans les salles obscures. Du jamais vu !

Mais à 9 ans, on n'a pas encore conscience de tout cela, on ne sait pas réellement ce que ça représente. On ne sait d’ailleurs pas non plus pourquoi "Titanic" est présenté pour une œuvre de cinéma, plus qu’un réel film populaire. Fort heureusement, en grandissant, on le revoit…

Et voilà que la rumeur a commencé à circuler, il y a trois-quatre ans de cela. Pour les cent ans du naufrage, "Titanic" devait refaire son apparition à l’écran. Et alors que la 3D a commencé à connaître le succès (la faute à un autre grand film de Cameron, "Avatar"), la possibilité d’un "Titanic" s'est laissée entrevoir. Le 14 février 2012 (la date ne s’invente pas), après des longs mois d’attente, une poignée de Français redécouvre "Titanic" sous un autre angle. Et quel angle ! De la profondeur, du relief, un réalisme encore plus fort et pressant, des détails encore plus criards, une émotion renforcée. Plus que jamais ce "Titanic" est beau, majestueux.

L'affiche a changé : l'accent est mis ailleurs 
Rien qu’à l’affiche, on sentait déjà que "Titanic" avait bougé avec son temps. En 1998, l’affiche du film arborait un montage kitsch du fameux couple Jack-Rose avec la proue majestueuse du Titanic, le tout dans des couleurs vivaces. Qui pouvait parler de catastrophe alors que l’accent était clairement mis sur l’aspect romantique et beau de la chose ? Quatorze années plus tard, l’affiche du "Titanic 3D" a complètement changé!
"Titanic" : affiches de 1998 et 2012 (20th Century Fox).

Jack et Rose sont toujours présents mais cette fois-ci, le couple enlacé a laissé place au couple inquiet, conscient que la mort approche. Le regard de Jack fixé sur l’horreur qui se déroule sous ses yeux alors que le bateau s’enfonce dans l’océan. Il s’accroche à ce paquebot qui a littéralement changé sa vie, dominant au passage la femme qui a bousculé ses sentiments, une Rose au regard paniqué. Le tout sur un fond noir, et un paquebot qui cette fois-ci ne dompte pas les flots mais en devient sa victime.

Une relance commerciale ? 
Naturellement, l’hypothèse d’une relance commerciale du "Titanic" (histoire de conforter et affirmer l’hyper-puissance du cinéma de Cameron en tête du box-office mondial) est faite. Logique, et loin d’être fausse. Jon Landau, le producteur du film, l’a affirmé, sans aucune hésitation : ce Titanic sera celui d’une nouvelle génération, celle qui n’a pas eu la chance de le voir en 1998. Alors forcément, "Titanic" va voir grossir ses recettes déjà immenses.

Mais ce n’est pas qu’une histoire de billets verts. James Cameron est conscient d’avoir signé en 1998 son film le plus majestueux, et même son dernier-né "Avatar" n’a pas réussi à frôler l’immensité de "Titanic". Il y avait encore quelque chose à exploiter. Quelque chose qui ne saute pas aux yeux dans une version plate en 2D et qui prend tout son sens en 3D : la profondeur de chaque plan, un relief plus présent. Il n’y a qu’un semblant d’esthétisme en plus, il y a une sensation d’immersion plus intense, parce que chaque détail va compter.

Un film plus fort grâce à la 3D 
En renforçant le réalisme du récit par celui de l’enveloppe physique, James Cameron et son équipe de 300 techniciens réussissent un pari osé, loin d’être gagné. Les petits détails – une assiette qui tombe, un pot de fleur sur une table lors d’un dîner, une chaise longue lors d’un travelling où Rose court à sa perte – prennent une importance encore plus intéressante.

Le travail de pixellisation et de mise en relief est effectué sur chaque scène, et cela dans le seul but de renforcer encore plus la profondeur déjà utilisée par Cameron en 1997 sur le tournage de "Titanic". Visionnaire l’ami James ? On n’en a jamais douté une seule seconde, et sa conversion 3D de "Titanic", fait avec des moyens et du temps, prouve que le cinéaste, passionné par son sujet, peut nous offrir des grands moments de cinéma. Et ce "Titanic 3D" en est un.

Sans avoir pris une seule ride, ce "Titanic" revisité par la 3D et James Cameron est tout aussi sublime que sa version originale. Un bijou d’émotion et de réalisme, une nostalgie toujours intense, la beauté d’une image, d’un thème musical intact et magnifique, le tout pour un voyage unique. James Cameron a réussi son pari avec brio, et rien pour cela, on retourne en salle dévorer ce grand chef-d’œuvre qu’est "Titanic".

Réf : nouvelobs.com